« Oui maman, oui oui... » Je griffonnais à l'aide d'un stylo sur une feuille de papier que j'avais attrapé sur mon bureau. Je griffonnais des cercles, des tourbillons, c'était machinalement que je faisais cela. Généralement, c'était lorsque je m'ennuyais. Sous-entendus qu'à l'instant présent je m'ennuyais. Ma mère avait cet effet sur moi lorsqu'elle me rabattait les oreilles avec mes séances chez la psy. « Oui, oui ». C'était à l'aide d'onomatopées et de monosyllabes que je lui indiquais que j'étais toujours présent au téléphone. Je n'entendais même plus ce qu'elle me disait, on m'avait pourtant appris la politesse lors de ma tendre enfance, mais j'avais grandi, j'avais changé et il m'arrivait d'oublier les notions de respects que l'on m'avait apprises, que mes parents avaient mis des années à m'enfoncer dans le crane. En cet instant, j'aurais mille fois préférés faire du sport (et Dieu sait combien je détestais faire du sport) que d'écouter les répliques de ma maman. Le sort s'acharnait sur moi, comme un footballeur s'acharnait à récupérer le ballon en plein match (ce qui, au passage, je trouvais ridicule). « Non, mais tu m'écoutes Jared ? » Merde, j'avais oublié de répondre. « Hein ? Quoi ? Comment ? » Le comble du comble, en à peine quelques secondes j'avais montré mon inattention face à la conversation (à sens unique). « Jared, je sais que je dois être très oppressante avec ça, mais s'est pour ton bien. » J'avais levé les yeux au ciel face à cette réplique et je savais que si ma mère aurait été présente en face de moi, elle m'aurait fait remarquer ce geste qui à son gout montrait de l'irrespect. « Mais maman, je ne sais même pas pourquoi j'y vais, je n'ai pas besoin de voir une psy. Qui t'as mis en tête une idée pareille ? » Elle avait dû l'entendre, je venais de souffler. Je ne supportais pas cela, devoir aller chez une psy. Mais j'y allais quand même, j'étais un gars que l'on pourrait qualifier de chien. Je faisais toujours ce que l'on me disait de faire, au niveau parental s'entend. Bien évidemment, je n'étais pas comme cela envers mon entourage amical. Et puis si je n'y allais pas, ma mère serait bien vite mise au courant. « Écoute, c'est bien simple Alexander, tu continues de voir la psy, au sinon, par l'un ou l'autre moyen je te fais rentrer au pays et crois-moi, je le ferais. » Changement d'humeur ! Je le sentais au ton de sa voix, mais aussi et surtout par le prénom qu'elle avait utilisé pour m'appeler, il était rare qu'elle m'appelle comme cela mais lorsqu'elle le faisait, elle était très sérieuse. Quelques secondes plus tard, j'avais fait un geste que j'aurais pu regretter. J'avais raccroché. J'avais raccroché au nez de ma mère. Elle avait essayé d'appeler à nouveau, mais j'ignorais ses appels, j'avais autre chose à faire qu'écouter son blabla.

Ce soir, j'avais prévu une sortie avec Nirvana qui était ma meilleure amie. Cela faisait maintenant longtemps que je n'avais plus passé un moment avec elle et je devais bien l'avouer, elle me manquait terriblement. Je ne savais pas encore à quelle heure elle voulait que l'on se retrouve, mais je me doutais que cela serait en soirée, aux alentours de vingt-et-une ou peut-être même vingt-deux heures, je devrais attendre son texto pour en être certain. En attendant, il était dix-sept heures et j'avais du temps à perdre. Enfin pas vraiment, mais bon. Tout d'abord, je devais terminer la lecture d'un texte de loi, ce n'était certes pas le truc le plus amusant à faire, mais je devais passer par là. Ce qui était marrant à observer, au sens ironique du terme, c'était que les fondateurs de ces textes de lois, ne savait pas faire la différence entre texte et roman. Si bien qu'il m'avait fallu près d'une demi-heure pour arriver au bout. Rajoutez à cela, une demi-heure à trois quarts d'heures afin de faire une analyse complète du dit texte. Ile était presque dix-huit heures trente lorsque je décidais de sortir de ma chambre et par la même occasion du campus, bizarrement, je ne rencontrais personne sur mon trajet menant de ma chambre à l'extérieur du bâtiment. J'avais été faire un tour, un long tour d'ailleurs, à la plage, dix-huit/dix-neuf heures étaient une assez bonne heure pour y aller étant donné le calme qui y régnait et le peu de personnes qui s'y trouvaient. J'aimais beaucoup aller à la plage, comme maintenant, car je pouvais réfléchir tranquillement, sans le bruit et la pollution de l'urbanité. Il était presque vingt heures trente lorsque j'étais de retour dans ma chambre.

Aussitôt dans ma chambre, je me décidais à aller prendre une bonne douche avant de partir. Une douche qui avait duré près de quinze minutes. Je devais le dire, cette douche m'avait vraiment fait du bien. Une fois sorti de sous l'eau, je m'étais séché le corps et les cheveux et avait enroulé une serviette autour de la taille pour ensuite rejoindre ma chambre et trouver ce que j'allais mettre. C'est d'ailleurs à ce moment-là que mon téléphone avait vibré. « En retard ! 22h là-bas. Bisous. » J'avais souris. Nirvana prenait souvent du retard sur son emploi du temps et cela ne m'étonnait plus. Je ne lui avais pas répondu, trouvant cela complètement inutile. Si elle avait reçu l'accusé, elle devait se douter que j'avais lu le message. Enfin bref. Je retournais dans mes fouilles, non pas archéologiques mais vestimentaires. Je trouvais alors une chemise noire ainsi qu'un pantalon de même couleur. Je m'habillais alors. Une fois cela fait, il était tant de partir pour le « Carpe diem. » J'attrapais, mes ray-ban (complètement inutile me direz-vous puisqu'il faisait noir, mais c'était une habitude, mauvaise, que j'avais prise), ainsi que mes clefs de voiture, je sortais ensuite de la résidence, direction le parking ou ma voiture était garée. Le temps de rejoindre la boite n'avait pas dépassé les vingt minutes. En allant me garer non loin de l'entrée, j'avais repéré une somptueuse jeune femme aux longs cheveux blonds, vêtue d'une magnifique robe blanche ... Nirvana. Je sortais, verrouillais mon bijoux et me dirigeais vers la belle. « Tu es ... sublime. » Lui avais-je dit un sourire sur les lèvres. Bien entendus je l'avais serrée dans mes bras avant de lui déposer un baiser (sur la joue).

J'avais encore énormément de souvenirs de ma vie à Madrid, tous ces moments passés avec mes parents, les balades dans le centre-ville, les sorties avec les amis. S'il y avait bien une chose que je devais regretter c'était cela. Mes amis, ces dits amis qui me manquaient pour avoir une vie parfaite. Du jour au lendemain, sans crier gare, j'étais parti, sans les prévenir. La raison était telle que si je devais leur faire mes « adieux », j'aurais eu encore plus de mal à partir malgré mon envie de « conquérir » l'Amérique. Ah l'Amérique, pays natal de mon père, ce pays qui m'avait tant fait rêver étant plus petit. Je me souviens encore, que chaque soir, avant de m'endormir, je demandais à mon père qu'il me raconte une histoire sur ce pays. Ainsi, je m'endormais et allais au pays des songes, rêvant de New-York, Los Angeles, Californie, Las Vegas. Mon rêve d'enfant s'était réalisé, puisqu'aujourd'hui je vivais à Las Végas, sans doute une des villes les plus connues des États-Unis pour ses casinos à chaque coin de rue et son université réputée un peu partout. Université où j'étudiais. À mon entrée dans cette dernière j'avais eu la crainte de ne pas savoir m'intégrer parmi tous ses fils et filles à papa. Parmi toute cette bourgeoisie ambulante. Et pourtant, avec un peu d'effort, j'avais réussi, j'étais dans une fraternité qui me collait à la peau. Certes, certain jour, je me posais des questions, j'avais des doutes quant à mon intégration réussie ou pas. Mais l'année qui avait suivi, ces doutes s'étaient envolés avec l'arrivée d'une personne qui était maintenant cher à mon coeur. Cette personne à qui ces derniers temps je n'avais accordé que trop peu d'attentions, je le regrettais et je devais me faire pardonner. Un pardon qui commencerais dès ce soir puisque j'avais rendez-vous avec Nirvana.

« Merci, mais tu n'es pas mal non plus. ». M'avait-elle répondu arborant un sourire magnifique, À peine étais-je arrivé que Nirvana passait son bras sous le mien afin de pouvoir nous diriger vers l'entrée. « Merci ». À peine ces mots prononcés que nous étions entrés dans la boite, où il fallait bien l'avouer. Il faisait étouffant. De plus, il n'était pas très compliqué de deviner, que mis à part la chaleur omniprésente, le « carpe diem » était bourré de testostérones. Il suffisait d'observer la piste de danse pour s'en rendre compte. Ces filles dansant collé-serré avec leur partenaire d'un soir à n'en pas douter. « Ce soir, tu auras le privilège de me raccompagner... je n'ai pas pris ma voiture. ». Je m'y étais un peu attendu. Il était rare lorsque Nirvana prenait sa voiture quand elle venait dans ce genre d'endroit. Généralement, quand j'arrivais avant elle, je la voyais qui sortait d'un taxi et je me doutais, que ce soir n'avait pas échappé à la règle. Sans doute était-ce pour cela, que, inconsciemment j'avais pris ma voiture. De toute façon, la raccompagner ne pouvait pas me poser de problèmes puisque nous vivions au même endroit. À quelques chambres d'écarts « Et bien, ce serait un grand honneur pour moi, de vous ramener à votre domicile mademoiselle Saint-James. ». Un sourire s'était dessiné sur mes lèvres alors que je prononçais ces paroles. Je commençais peu à peu à croire qu'elle avait oublié le fait que je l'avais un peu délaissée ces derniers temps. Mais aussi rapidement que l'éclair et comme si elle avait lu dans mes pensées, elle me l'avait rappelé. « Tu m'as manqué ! Je commençais à croire que tu m'avais remplacée ! Ce que tu n'as pas fait j'espère ?! » Je n'avais pas laissé le temps au « silence » de s'installer puisqu'à peine m'avait-elle adressé la parole que je lui avais répondu. « Comment pourrais-je te remplacer voyons ? Tu es unique et donc par conséquent irremplaçable. Toi aussi tu m'as beaucoup manqué. »

Je n'avais pas l'habitude de me rendre dans ce genre d'endroit. Je préférais de loin les soirées tranquilles à la maison, à me regarder des films tout en m'avalant des pop-corn's. Mais pour Nirvana je pouvais aisément faire un effort surtout que je devais me faire pardonner, alors refuser n'aurait pas été un acte très ... sympathique dirons-nous. Bien évidemment, je ne refusais jamais de sortir mais seulement de façon occasionnelle. Pour tel ou tel événement, ou pour se détendre après une journée lourde de travaux. Bien qu'en fait, les journées, elles étaient toujours lourdes de travaux. Soit, nous voilà, que nous étions arrivés au bar. « Tiens tu sais qu'un garçon assez incroyable m'a conseillé de t'inviter à un mariage ! Apparemment il pense que tu en serais ravi ! C'est dingue non ?! » Référence à notre conversation messenger de la veille ? Non ... pas du tout ... Je feignais alors l'innocence. « Ah bon ? T'accompagner à un mariage ? Ah oui, ce garçon avait tout à fait raison, je serais ravi de t'y accompagner. ». Dans mon dos, alors que je parlais avec Ana' je sentais des regards se poser sur nous, ou plutôt se poser sur la jeune femme qui m'accompagnait. Je savais que cela arriverait, parce qu'il ne fallait pas se leurrer. Nirvana était une très jolie jeune femme. Encore plus ce soir dans cette splendide tenue. Quelques instants plus tard, je me tournais vers le barman qui arrivait vers nous afin de prendre notre commande. Je posais à nouveau mon regard sur la belle. « Tu prends quoi ? »